Je crée des œuvres
vidéographiques dont les fondements s’appuient sur des problématiques
politiques, sociales ou culturelles. J’explore la relation de l’individu vis-à-vis de lui-même, de l’autre et
de son milieu de vie. Ces problématiques sont abordées visuellement
à partir d’une réflexion plastique et esthétique basée sur une exploration du
mouvement et du temps.
Je transpose en images ce qui peut se dégager de cette relation plutôt
que de prétendre l’exprimer objectivement. Ainsi, le sujet capturé en vidéo est
interprété et traduit de façon subjective. La poétique développée au travers de ma pratique
vidéographique me permets de lier mes réflexions sur les rapports entre les
gens et mes expériences au contact de différents milieux sociaux. Par la
fiction, je construis un regard critique sur ce qui anime l’individu à être en contact avec
l’autre et à la fois sur ce qui l’en éloigne.
Cela prend la forme de tableaux vidéographiques: des plans
fixes incorporant du mouvement. Je travaille la couleur, l’assemblage, la
fragmentation et la manipulation d’images, à l’intérieur desquelles je découpe
des individus sur fond uni, sans arrière-plan ni référence au contexte d’où ils
proviennent. Par le travail de montage, mes figurants se voient isolés,
extraits de leurs réalités et transposés dans un univers composite de plusieurs
individus. Ce processus a pour effet de révéler un espace-temps
qui leur semble propre, alors qu’ils évoluent dans l’ignorance des réalités
d’autrui. Au-delà de l’illusion résultant de ce procédé, on comprend rapidement
que ces espaces qui paraissent clos ne sont qu’un leurre. Ces choix esthétiques et ces
stratégies formelles conduisent la construction des images.
Les tableaux ont en commun de présenter des individus filmés indépendamment les uns des autres, dans le
même univers imposé à l’intérieur duquel ils sont relativement libres de leur
action. Toutefois, les limites de cette liberté sont définies par le cadrage de
la caméra, ce qui a pour effet de limiter leurs actions et de contrôler
leurs gestes. Le corps devient un objet, dépossédé de toute expression sonore.
Le seul langage qui transparaît de la personnalité individuelle est celui du
mouvement corporel pris dans un espace
confiné. Chacune des cases devient un microcosme avec ses limites, ses règles et son fonctionnement.
Le
processus de montage constitue un espace visuel ouvert dans lequel le public a
sa place et peut participer pleinement à l'interprétation et à la lecture de
l'œuvre. Cet espace est pour moi une quête d’équilibre de l’image tant dans sa
composition que dans sa compréhension. Il se veut une démocratisation du
langage de l'art contemporain pour un public qui n’en connaît pas les codes.
L’art est évidemment relié aux conditions sociales et politiques. Ce constat
anime mon projet en établissant un lien entre ma conception de l’installation
vidéo en tant que recherche formelle et ma réflexion sur les différentes façons
de voir et de comprendre nos espaces temporels et physiques.